Tribunal administratif de Montpellier, 10 janvier 2024, 2400145
Vu la procédure suivante
: Par une requête enregistrée le 9 janvier 2024, la société Epicerie Castillet, représentée par Me Nivet, demande au juge des référés : 1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de l'arrêté du 3 janvier 2024 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a prononcé la fermeture immédiate de l'établissement exploité sous l'enseigne " Epicerie Castillet " situé 11 rue Jean Peyrat à Perpignan pour une durée de soixante jours ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que :
Sur la
condition d'urgence : - la fermeture immédiate de l'établissement qu'elle exploite caractérise une situation d'urgence à ce que soit ordonnée sans délai la suspension de cette mesure dès lors qu'elle va entraîner une situation de cessation de paiement compte tenu des charges évaluées à 13 577 euros pour deux mois alors qu'elle ne dispose d'une trésorerie qu'à hauteur de 12 000 euros environ ; Sur l'atteinte grave et manifestement illégale portée à une liberté fondamentale : - la fermeture administrative porte atteinte à la liberté d'entreprendre qui est une liberté fondamentale et à la liberté du commerce et de l'industrie ; - l'arrêté attaqué est entaché d'erreur manifeste d'appréciation et la mesure de fermeture revêt un caractère disproportionné compte tenu de l'absence de réitération des manquements qui lui sont reprochés et de l'absence d'activité de vente illicite de tabac. Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts ; - le code de justice administrative. Le président du tribunal a désigné M. Charvin, vice-président, pour statuer sur les demandes de référé. Considérant ce qui suit :
1. D'une part, en vertu de l'article L. 521-2 du code de justice administrative le juge des référés peut, en cas d'urgence caractérisée, ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une autorité administrative aurait porté une atteinte grave et manifestement illégale. L'article L. 522-3 de ce code prévoit que le juge des référés peut rejeter une requête par une ordonnance motivée, sans instruction contradictoire ni audience publique, lorsqu'elle ne présente pas un caractère d'urgence ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.
2. D'autre part, l'usage par le juge des référés des pouvoirs qu'il tient des dispositions précitées est subordonné à la condition qu'une urgence particulière rende nécessaire l'intervention dans les quarante-huit heures d'une mesure destinée à la sauvegarde d'une liberté fondamentale. Il appartient ainsi au requérant de justifier dans tous les cas de l'urgence, laquelle ne saurait être regardée comme remplie en l'absence d'éléments concrets, propres à chaque espèce, de nature à établir l'urgence des mesures sollicitées dans le cadre de cette procédure particulière de référé qui implique l'intervention du juge dans des délais particulièrement brefs.
3. La société Epicerie Castiller, exploitante de l'enseigne du même nom située 11 rue Jean Peyrat à Perpignan, demande au juge des référés d'ordonner la suspension de l'arrêté du 3 janvier 2024 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a prononcé la fermeture immédiate de cet établissement pour une durée de soixante jours.
4. Aux termes de l'article 1825 du code général des impôts : " La fermeture de tout établissement dans lequel aura été constatée l'une des infractions mentionnées à l'article 1817 peut être ordonnée, pour une durée ne pouvant excéder trois mois, par arrêté préfectoral pris sur proposition de l'autorité administrative désignée par décret. Cet arrêté est affiché sur la porte de l'établissement pendant la durée de la fermeture ". Aux termes de l 'article 1817 du même code : " Les dispositions de l'article 1750 sont applicables aux infractions prévues aux articles 1810, 1811 et 1812 ". Enfin, aux termes de l'article 1810 de ce code : " Indépendamment des pénalités prévues aux articles 1791 à 1794, les infractions visées ci-après sont punies d'une peine d'un an d'emprisonnement, portée à trois ans pour les infractions mentionnées au 10° du présent article, et les moyens de transport sont saisis et confisqués, ainsi que les récipients, emballages, ustensiles, mécaniques, machines ou appareil : () 10° Quelles que soient l'espèce et la provenance de ces tabacs : fabrication de tabacs ; détention frauduleuse en vue de la vente de tabacs fabriqués ; vente, y compris à distance, de tabacs fabriqués ; transport en fraude de tabacs fabriqués ; acquisition à distance, introduction en provenance d'un autre État membre de l'Union européenne ou importation en provenance de pays tiers de produits du tabac manufacturé acquis dans le cadre d'une vente à distance ".
5. La société requérante fait valoir que l'arrêté attaqué est entaché d'erreur manifeste d'appréciation et la mesure de fermeture revêt un caractère disproportionné compte tenu de l'absence de réitération des manquements qui lui sont reprochés et de l'absence d'activité de vente illicite de tabac et invoque ainsi l'existence d'une atteinte grave et manifestement illégale portée, par l'arrêté attaqué, à la liberté d'entreprendre et à la liberté du commerce et de l'industrie.
Cependant, il résulte de l'instruction, et notamment du procès-verbal de constatation d'infraction du 8 novembre 2023 des services de la direction régionale des douanes de Perpignan, qu'a été constatée le 25 octobre 2023 dans son établissement la présence de 52 paquets de cigarettes et de 5 paquets de tabac à narguilé, d'origine espagnole, et que, interpelé sur la présence de ces produits, M. A, gérant de cet établissement, a reconnu la vente de tabac dans son commerce. Par suite, et dès lors que la seule constatation de ce manquement justifiait légalement la fermeture de cet établissement pour une durée de 60 jours en application des dispositions précitées du code général des impôts, la société Epicerie Castillet n'est pas fondée à soutenir que le préfet des Pyrénées-Orientales, aurait, en édictant l'arrêté contesté, porté une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d'entreprendre et à la liberté du commerce et de l'industrie. 6. Il résulte de ce qui précède que la requête de la société Epicerie Castillet doit être rejetée selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du code de justice administrative, en ce compris ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du même code.
O R D O N N E :
Article 1er : La requête de la société Epicerie Castillet est rejetée. Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Epicerie Castillet. Copie pour information en sera adressée au préfet des Pyrénées-Orientales. Fait à Montpellier, le 10 janvier 2024. Le juge des référés, Jérôme Charvin La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Orientales en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, Montpellier, le 10 janvier 2024 Le greffier, D. Martinier N°2400145
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