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Fermeture d'établissement d'enseignement privé et condition d'urgence du référé suspension

philippotremy

Dernière mise à jour : 1 juin 2024



Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, 7 mai 2024, 24057712405771

Mots clés

requête • contrat • apprentissage • rejet • requérant • ressort • condamnation • sanction • rapport • référé • requis • statuer  


 : Par une requête enregistrée le 22 avril 2024 et un mémoire complémentaire enregistré le 5 mai 2024, l'association " Eveil, découverte et apprentissage " (ci-après EDA), représentée par Me Maujeul, demande au juge des référés, statuant en application de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : 1°) d'ordonner la suspension de l'exécution de la décision du 3 avril 2024, notifiée le 8 avril 2024, par laquelle le préfet du Val-d'Oise a ordonné la fermeture immédiate de l'école EDA, établissement privé d'enseignement hors contrat, situé au 16 avenue Alexandre Dumas à Soisy-sous-Montmorency (95230) ; 2°) de mettre à la charge de la commune de Clamart une somme de 3 600 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la condition d'urgence est remplie, dès lors que l'exécution de l'arrêté prononçant la fermeture administrative de l'établissement porte atteinte à la scolarisation de jeunes enfants représentant un danger pour leur équilibre psychologique, empêche l'association de poursuivre son activité d'enseignement et la met en péril financièrement ; Les moyens suivants sont propres à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté attaqué : - il est insuffisamment motivé ; - il est entaché de vices de procédure tirés de l'absence de communication des rapports de contrôles inopinés et de l'ancienneté de la mise en demeure ; - il est entaché d'une erreur de droit, tirée de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 442-2 du code de l'éducation ; - il est entaché d'erreurs d'appréciation, eu égard aux prétendus manquements administratifs, au manque de sécurité des locaux, et au manquement de l'enseignement dispensé ; - il est entaché d'une disproportion de la sanction. Par un mémoire en défense enregistré le 3 mai 2024, le préfet du Val-d'Oise conclut au rejet de la requête en l'absence d'urgence et de moyens de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision.

Vu :

- la requête n° 2405906 enregistrée le 22 avril 2024 par laquelle l'association " Eveil, découverte et apprentissage " demande l'annulation de l'arrêté contesté ; - les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code de l'éducation ; - le code de justice administrative. Le président du tribunal a désigné M. Thobaty, vice-président, en application de l'article L. 511-2 du code de justice administrative, pour statuer sur les requêtes en référé. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience du 6 mai 2024 à 10h00. Ont été entendus au cours de l'audience publique, tenue en présence de Mme Soulier, greffière d'audience : - le rapport de M. Thobaty, juge des référés ; - les observations de Me Maujeul, représentant l'association " EDA " et de la présidente de l'association requérante qui concluent aux mêmes fins par les mêmes moyens. - et les observations des représentantes du préfet du Val-d'Oise qui concluent aux mêmes fins par les mêmes moyens. La clôture de l'instruction a été prononcée à l'issue de l'audience publique.

Considérant ce qui suit

 : 1. Par un arrêté du 3 avril 2024, le préfet du Val-d'Oise a ordonné la fermeture immédiate de l'école EDA, gérée par l'association " EDA ", une école privée hors contrat. Par cette requête, l'association " EDA " demande au juge des référés, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, d'ordonner la suspension de l'exécution de cet arrêté.


2. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision () ". Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : En ce qui concerne l'urgence :


3. L'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés, saisi de conclusions tendant à la suspension d'un acte administratif, d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue. L'urgence doit être appréciée objectivement compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'affaire.


4. Pour justifier de l'urgence exigée à l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'association requérante indique que cette décision a pour effet de l'empêcher purement et simplement de poursuivre son activité d'enseignement, de placer les parents des 25 élèves dans une impasse de scolarisation et de priver l'association de sa seule ressource constituée par une somme de 420 euros de frais mensuels facturés aux parents pour faire face à ses charges. Il ressort des pièces du dossier que la décision attaquée prive l'association requérante de toute ressource et l'empêche de poursuivre toute activité. Si l'administration invoque l'intérêt public à scolariser dans de bonne conditions les élèves de cette école, il ressort des pièces du dossier que si 7 élèves sont désormais scolarisés dans une école publique ou sous contrat, les autres élèves dont 3 en situation de handicap relèvent, soit de l'instruction en famille sans aucune garantie de délivrance de l'instruction obligatoire, soit sont déscolarisés. Dans ses conditions, il est établi que les effets de la décision portent une atteinte suffisamment grave et immédiate à la situation de l'association requérante de nature à caractériser une situation d'urgence au sens des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, son exécution soit suspendue.


En ce qui concerne le doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté :


5. Il résulte de l'instruction que la décision prononçant la fermeture administrative d'un établissement privé hors contrat qui accueille concomitamment des élèves relevant de l'école maternelle, de l'école élémentaire et deux collégiens handicapés ne comporte pas des précisions suffisantes sur les manquements qui sont reprochés dans la tenue des listes d'élèves et des personnels enseignants. S'agissant des manquements à l'acquisition du socle commun des connaissances, de compétence et de culture, la décision ne comporte aucune précision sur les exigences par niveau et englobe indistinctement les élèves d'école maternelle, élémentaire et du collège pour lesquels les exigences et les références diffèrent. En outre, la décision ne précise pas si ces manquements concernent l'année scolaire 2022-2023 ou l'année scolaire 2023-2024 et ne fait aucune mention des réponses apportées à la mise en demeure par l'association requérante. Dans ces conditions, cette décision est insuffisamment motivée. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration est propre, en l'état de l'instruction, à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée


6. Il résulte de ce qui précède que l'exécution de la décision du 3 avril 2024 laquelle le préfet du Val-d'Oise a ordonné la fermeture immédiate de l'école EDA, établissement privé d'enseignement hors contrat, situé au 16 avenue Alexandre Dumas à Soisy-sous-Montmorency (95230) est suspendue jusqu'à ce qu'il soit statué sur la requête au fond. Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Il résulte des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée, et peut, même d'office, ou pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. 8. Il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, qui est la partie perdante, une somme de 600 euros à verser à l'association " Eveil, découverte et apprentissage en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

O R D O N N E :

Article 1er : L'exécution de la décision du 3 avril 2024 par laquelle le préfet du Val-d'Oise a ordonné la fermeture immédiate de l'école EDA, établissement privé d'enseignement hors contrat, situé au 16 avenue Alexandre Dumas à Soisy-sous-Montmorency (95230) est suspendue jusqu'à ce qu'il soit statué sur la requête au fond. Article 2 : L'Etat versera à l'association " Eveil, découverte et apprentissage une somme de 600 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à l'association " Eveil, Découverte et Apprentissage ", au préfet du Val-d'Oise et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Fait à Cergy le 7 mai 2024 Le juge des référés, Signé G. Thobaty La République mande et ordonne au préfet du Val-d'Oise, en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

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